Une nouvelle guerre qui fait oublier l’Ukraine (et ses difficultés militaires), le Haut-Karabagh, le Sahel et tant d’autres conflits. La planète est un chaudron et comme à l’habitude, le cours de l’or à plus de $ 2 000 l’once pendant quelques jours reflète ces angoisses.
Face à de tels drames, il peut paraître déplacé de parler des marchés même s’il s’agit là au fond d’un bon baromètre. La guerre entre Israël et le Hamas ne devrait pas avoir d’impact comparable aux événements de 1973 qui avaient mené au premier choc pétrolier : le scénario catastrophe présenté par la Banque mondiale (qui pousse le prix du baril jusqu’à $ 157) n’apparaît pas crédible. Dans les premiers jours qui ont suivi le 7 octobre, le baril de pétrole a pris $ 4 ou $ 5 vite reperdus par la suite. En réalité, les principaux producteurs arabes n’ont guère envie d’utiliser « l’arme » du pétrole. L’Arabie saoudite a déjà diminué sa production d’un million de barils par jour et ne souhaite manifestement pas aller au-delà. L’Iran risque de souffrir de sanctions américaines appliquées de manière plus stricte que ces derniers mois, mais ceci sera compensé en partie par la levée de l’embargo américain sur le pétrole vénézuélien. Les équilibres du marché mondial du pétrole ne devraient guère évoluer et le marché rester dans la zone des $ 80.
C’est en fait le gaz naturel qui a le plus réagi au lendemain du 7 octobre. Israël a fermé son principal champ gazier, a limité ses livraisons à l’Égypte qui a dû réduire ses expéditions de GNL. Cela a suffi au TTF européen pour repasser au-dessus de 50 euros. Ceci étant, avec un niveau de stockage de gaz en Europe qui dépasse 99 % des capacités (et même des excédents stockés en Ukraine), les craintes, même avec un hiver rigoureux, sont limitées et c’est au contraire une surcapacité de GNL qui s’annonce pour 2024 avec la mise en route de nouvelles capacités de liquéfaction aux États-Unis. Le conflit intervient au moment où va s’ouvrir aux Émirats la COP28. L’ambiance risque d’y être tendue avec des États-Unis en porte à faux et une situation politique déjà concentrée sur l’échéance électorale de 2024 et l’improbable duel Biden-Trump. Quant à la Chine, sa situation économique continue à inquiéter et le niveau record de ses importations de pétrole, de gaz et de charbon n’augure rien de bon en matière de transition énergétique.
Le contraste est immense entre l’ampleur des défis auxquels est confrontée la planète et qui nécessiteraient des réponses globales et la fragmentation d’un monde qui se déchire. Raymond Aron avait cruellement raison lorsqu’en 1969, il déclarait : « je crois que tout est toujours en question, que tout est toujours à sauver, que rien n’est définitivement acquis et qu’il n’y aura jamais de repos sur Terre pour les hommes de bonne volonté. »
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